Les Sept Foudres d’Allah – Nicolas Cluzeau

Les Sept Foudres d’Allah

De Nicolas Cluzeau

Griffe d’encre – 110 pages

Je vous ai déjà confessé mon début de fascination pour la ville d’Istanbul. Et bien c’est un des motifs qui m’a amenée à craquer sur Les Sept Foudres d’Allah de Nicolas Cluzeau. C’est un motif comme un autre et ce n’est pas pire que le prétexte de la couverture qui déchire. D’ailleurs la couverture ici, signée Zariel, illustre bien le texte de la novella même si je ne suis pas très fan du style (les goûts et les couleurs…). Istanbul donc. Pas l’Istanbul contemporaine mais l’Istanbul ottomane, celle de Soliman le Magnifique sultan pour lequel on construit une nouvelle mosquée, la mosquée Süleymaniye qui domine les rives du Bosphore. En ce 23 Dhou al qi`da 967 (soit le 15 août 1560, une date à laquelle la construction de la mosquée Süleymaniye était, en réalité, déjà achevée), le cadavre du savant et érudit maître Ali Danishmend est retrouvé sur le chantier. Le capitaine Sertaç est chargé d’enquêter sur cette mort qui ressemble à un suicide. Mais la perspicacité de se petite-fille Aliyé, qui l’accompagne parfois dans ses investigations, le pousse bien vite à conclure qu’il s’agit bien d’un meurtre. L’étrange vélin recouvert d’équations et de schémas qu’il cachait dans son pantalon et ses recherches excentriques, à la limite du blasphème, pourraient constituer des mobiles très convaincants. Et l’incendie de sa maison et la fouille de son bureau indiquent que ses recherches sur l’aimantation et le stockage de l’énergie produite par la foudre ne laissaient pas indifférent.

Nous avons donc une enquête policière dans les hautes sphères culturelles d’Istanbul mêlant allègrement la science et la religion, la modernité technique et les superstitions ancestrales. Ainsi ce qui paraît être un Djinn aux pouvoirs démesurés n’est peut-être qu’un homme disposant d’une technologie d’avant-garde… Le déroulement de l’enquête en elle-même est tout à fait classique dans la forme mais sa conclusion, très science-fictive alors que le texte flirte en permanence avec le fantastique, parvient à surprendre le lecteur. Ce qui la rend bien plus intéressante tient plus dans les détails et dans la minutie du contexte. Par petites touches, Nicolas Cluzeau parvient à nous faire sentir la complexité des relations sociales dans ces sphères savantes et politisées : les courants religieux et leurs rivalités, la place de la science dans un empire très religieux mais aussi la place de la femme… Aliyé, intelligente et éduquée, fait figure d’extraterrestre et peine à être considérée à sa juste valeur. Certaines portes lui resteront à jamais fermées au motif de son sexe. Les personnages – Aliyé la première mais les personnages secondaires ne sont pas en reste – sont bien dessinés, aidés par des dialogues fins, maîtrisés et réalistes. La ville et ses paysages magnifiques s’offrent au lecteur. Ne boudons donc pas notre plaisir de déambuler dans les rues et collines d’Istanbul au côté de Sertaç et d’Aliyé.

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