Les Dieux de jade et d’ombre – Silvia Moreno-Garcia

Les Dieux de jade et d’ombre

Silvia Moreno-Garcia

Bragelonne – 312 pages. Traduction d’Olivier Debernard

Retour de chronique du Bifrost 114

Après Mexican Gothic, un Rebecca mexicain teinté d’inspirations lovecraftiennes et La Fille du Docteur Moreau, une réinterprétation du classique de H.G. Wells, les éditions Bragelonne poursuivent les traductions des romans de Silvia Moreno-Garcia avec Les Dieux de jade et d’ombre, qui puise son inspiration dans le Popol Vuh, recueil des mythes créateurs du peuple quiché.

À la mort de son père, Casiopea Tun et sa mère reviennent dans la famille maternelle à Uukumil, dans la péninsule du Yucatán. Brune de peau et pauvre, Casiopea est souvent négligée et assignée aux tâches ménagères dans la somptueuse demeure de son grand-père. Elle endure aussi les mauvais traitements infligés par son cousin.
Une nouvelle fois victime de brimades, elle se retrouve seule dans la maison familiale et libère accidentellement Hun-Kamé, le dieu de la mort, enfermé dans un coffre par son traître de frère jumeau, Vucub-Kamé. Ce dernier a dispersé des parties du corps de Hun-Kamé à travers le Mexique, les confiant à des sorciers, des démons et d’autres entités surnaturelles. Après avoir pris le trône de Xibalba, le monde souterrain, Vucub-Kamé ambitionne d’annexer le monde des humains et de restaurer à coup de sacrifices sanglants la gloire des époques passées. Casiopea, lié par la magie à Hun-Kamé, n’a d’autre choix que de le suivre dans sa reconquête de L’Inframonde. Leur périple les conduit à travers tout le Mexique, du Yucatán à Veracruz, en passant par Mexico, El Paso et la Basse-Californie. Hun-Kamé, privé d’une partie de sa puissance magique, puise dans la force vitale de Casioepa. Cette relation symbiotique, tout autant que symbolique des sentiments naissants entre les deux personnages, n’est pas sans conséquence : Casiopea meurt à petit feu en absorbant la magie de Hun-Kamé, tandis que le dieu devient de plus en plus vulnérable à la mort.

Les Dieux de jade et d’ombre est avant tout l’histoire de l’émancipation d’une jeune fille et de sa découverte d’elle-même. Silvia Moreno-Garcia met en scène des personnages bien caractérisés confrontés à des dilemmes moraux et plongés dans un monde menaçant jalonné de cauchemars ensanglantés, de rituels religieux macabres et d’épreuves dangereuses subies dans le monde souterrain. Elle propose aussi une réflexion sur le destin, la loyauté, la famille, la vie, la mort et la condition humaine. Le roman se concentre surtout sur la romance impossible entre les deux protagonistes, laissant le contexte historique — la fin des années 1920, alors que le Mexique émerge d’une période de conflit révolutionnaire — en toile de fond. Et si l’exploration des légendes et de la culture maya s’avèrent plaisante, on ne peut s’empêcher de trouver l’ensemble légèrement décevant en raison d’une structure narrative un peu prévisible et resserrée autour des émois des protagonistes.

Une citation

—Les mots sont des graines, Casiopea, dit-il. Avec les mots, on brode des histoires, et les histoires donnent naissance à des mythes, et les mythes recèlent un grand pouvoir. Oui, les choses que tu nommes ont du pouvoir.

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