Sorcier d’Empire, Ars Obscura T1 – François Baranger

Sorcier d’Empire
Ars Obscura T1

De François Baranger

Denoël Lunes d’encre – 496 pages

Avec Sorcier d’Empire, François Baranger, artiste à multiples casquettes, illustrateur (notamment des oeuvres de Lovecraft) et écrivain de thrillers et SF chez Bragelonne et Critic, nous propose le premier tome d’une série de fantasy uchronique qui comptera au total quatre livres. L’illustration de couverture de ce premier tome est de François Baranger lui-même. Elle donne le ton du roman. On y découvre un personnage de dos, coiffé d’un tricorne et armé d’une épée et d’un pistolet, et qui jette un regard en coin au lecteur, le dos tourné. Inquiétant à souhait.

Premier empire alternatif

En 1815, l’Empire de Napoléon Ier a atteint son apogée. Grâce à Élégast, un sorcier énigmatique dévoué à l’Empereur et maître de l’Art Obscur, une forme de magie puissante et terrifiante, inconnue du reste du monde, Napoléon a réussi à conquérir toute l’Europe, y compris l’Angleterre. Lors de l’hiver 1812 en Russie, l’utilisation de sorts de chaleur a évité la débâcle que l’on connaît. Prudent, Napoléon a décidé de quitter la Russie et son hiver glacial afin de poursuivre ses campagnes militaires. Cependant,la Russie résiste toujours et une coalition ennemie semble se former contre une France fortement militarisée, où tous les hommes en âge de se battre sont fortement invités à rejoindre les rangs de l’armée. Au sein de celle-ci, les membres de la Garde hermétique, qui servent et protègent le Sorcier d’Empire, instillent la terreur dans la société par leur méthodes radicales lorsqu’il s’agit de traquer ou d’éliminer de potentiels ennemis.
La population vit aussi dans la peur des bulles noires, les résurgions. Ces phénomènes surnaturels imprévisibles engloutissent tout sur leur passage, libérant d’effroyables créatures, sauvages et destructrices, dont l’origine demeure mystérieuse. Rares sont ceux survivent à une bulle noire et ceux qui ont le malheur de se trouver à proximité en gardent des séquelles physiques, sous la forme d’une tache noire indélébile.
En Russie, le prince Nicolas étudie aussi l’occulte avec l’objectif d’assurer à son frère, le tsar Alexandre Ier, une victoire contre la France.

Classique et efficace

Roman choral, Sorcier d’Empire suit les pas de nombreux personnages et multiple les points de vue. Parmi eux, Ludwig Arcerese, un mercenaire, sorcier aux pouvoirs innés mais dont il ne sait rien puisqu’il a perdu tout souvenir de son passé. Il chasse les résurgions depuis la mort tragique de sa famille. Éthelinde Ordant, érudite et guerrière, pourchassées par la Garde hermétique, cherche éclaircir les circonstances de la disparition de son père, embarqué à la suite de Napoléon lors de la campagne d’Égypte. Nous suivons également des hommes d’armes, parmi lesquels Irénion Brégante, capitaine de la Garde impériale napoléonienne, qui se voit confier une mission spéciale, ainsi que de simples soldats. En Russie, Pavel Laptev, un serviteur du palais, joue le rôle de guide pour le lecteur, l’accompagnant dans la découverte des événements étranges qui se déroulent dans à la cour.
Ce premier tome pose les fondations de l’univers et de l’intrigue, avec une cohérence forte, sans pour autant manquer de rebondissements pour chaque protagoniste. François Baranger dote ses personnages de traits intéressants et uniques, leur donnant de la profondeur. Chaque fil narratif fait progresser l’histoire, maintenant l’intérêt. Avec des chapitres courts, un rythme soutenu, une forte dose d’action et de nombreux dialogues, Sorcier d’Empire facilite l’immersion et prend des airs de page-turner. On perçoit l’existence d’un système de magie cohérent, suscitant une curiosité grandissante. De facture classique, le roman fonctionne parfaitement bien. Le prochain tome, Second sorcier, est attendu pour septembre 2023. Il ne nous reste plus qu’à attendre et voir ce qu’il nous réserve…

Une citation et un extrait

Les idées valent souvent plus que les hommes qui les ont énoncées !

« L’éducation que j’ai reçue m’a dotée d’un esprit rationaliste et analytique. Pour moi, la science est l’outil universel de la description du monde. Une fois que j’ai admis que la magie était une réalité, qu’elle faisait partie du monde, j’ai décidé de la soumettre à l’analyse scientifique, comme n’importe quel autre phénomène naturel. »
Ludwig se rappela la discussion de la veille, et sa déduction concernant le projet d’article de la jeune femme.
« Ce n’est pas un article sur les résurgions que vous comptez rédiger pour l’Encyclopédie, c’est une étude complète de l’Art Obscur ! »
Le visage de son interlocutrice se ferma, comme si elle craignait qu’il ne soit de nouveau en train de la railler.
« Je cherche avant tout à connaître mes adversaires ! gronda-t-elle en tâchant de contenir sa voix afin de ne pas attirer l’attention. Ceux qui sont impliqués dans la mort de mon père se sentent protégés par leur maîtrise des puissances occultes. Je ne pourrai leur demander des comptes que si je connais moi aussi ces forces, à défaut de savoir les mettre en œuvre. Je procède donc à leur étude systématique, ainsi qu’un scientifique se doit de le faire pour n’importe quel phénomène observable et mesurable. Si, en définitive, je suis capable d’en extraire un article valable, digne d’être admis à l’Encyclopédie de M. Diderot, alors tant mieux, une petite parcelle positive aura été tirée de cette triste histoire. Mais ne doutez pas de ma détermination. Toutes ces recherches, longues et patientes, n’ont qu’un objectif : trouver et punir les responsables de la mort de mon père ! »

 

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