de Laurent Gidon
Mnémos – 275 pages
Djeeb Scoriolis est … En fait il est très difficile de dire ce qu’est Djeeb et encore plus de comprendre qui il est. Pas tout à fait aventurier (ni très habile au combat, ni rompu aux techniques de survie en milieu hostile), pas tout à fait artiste (bien qu’il en ait l’apparence et la tenue vestimentaire, il n’a pas de talent spécifique) , pas vraiment magicien (bien que son sac recèle un bon nombre d’accessoires lui permettant de jouer des tours), il ne répond pas non plus aux critères du héros. Il ne cherche pas à réaliser une quête destinée à l’élever (sauf dans la bonne société de la ville d’Ambeliane mais l’enjeu ne dépasse guère sa personne), n’est pas doté de hautes qualités morales (on peut même dire qu’il n’obéit qu’à sa propre morale), ni de convictions politiques ou religieuses. Djeeb n’est fidèle qu’à lui même (et ce n’est déjà pas si facile). Comme il a une haute opinion de lui même (et une grande confiance en ses capacités) il part à la conquête d’Ambeliane, ville mystère que nul ne pénètre. Enclavée dans une montagne elle n’est accessible que par la mer et la passe est truffée de dangers (la couverture du livre est d’ailleurs très expressive sur ces premiers dangers). La ville, et sa société dont les dehors raffinés cachent un abîme de violence, est un piège en elle même. Ses chances de réussir sont minces mais Djeeb a un atout. Il est doté d’une intuition très développée, d’un sixième sens qui lui permet de sentir et ressentir, les ambiances, les gens. Les relations que ces derniers ont tissé entre eux sont, pour lui, autant de fils visibles, fils qu’il a appris à manipuler. Son arme favorite : les mots, le verbe ou plutôt le Verbe… Il y a du Caracole dans ce Djeeb. Caracole est le troubadour de La Horde du contrevent, un magicien qui fait virevolter les mots, les cœurs et les tripes. Vif, fait de vent, il est insaisissable, ne s’attache à rien (et presque à personne). Djeeb réussit à être complexe et léger, énervant et attachant, éclatant et sombre. Ses aventures à Ambeliane sont palpitantes, rocambolesques et à son image : toutes en démesure (jusqu’à la fin) y compris dans les moments plus tragiques (car il y en a).
La plume de Laurent Gidon (connu aussi sous le pseudo de Don Lorenjy) sert parfaitement le livre. Vive dans les scènes d’actions, élégante quand il faut suivre les mondanités ambelianes, éloquente pour la voix de Djeeb, sobre face à la mort. La forme est ici au service du fond et s’adapte au récit, la narration est exempte de longueurs et de défauts. Le style, très travaillé, pourra parfois paraître un peu artificiel mais, sans lui, Djeeb serait aussi éphémère qu’une rafale au milieu d’une tempête.
- Lire aussi les avis de NooSFere, Cafard Cosmique, atemporel, Mythologica, Phénix-Web, Elbakin, Angua, Nébal, Coeur de chêne, Lire en tout genre, Chiffonnette, Les chroniques de l’imaginaire.
Merci Lhisbei. Bien vu la tentative de définition de Djeeb. C’est vrai qu’il est un peu rétif et rentre difficilement dans la case du héros. Mais quand même, le comparer à Caracole : flatteuse, va !
de rien []. point de flatterie dans la parenté de Djeeb : c’est pas de ma faute s’ils se ressemblent …[]
de la fantasy comme ça j’en reprendrai bien plus souvent.
La comparaison avec [I]La horde du contrevent[/I] place la barre très haut…
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