L’Enfant monstre
La Geste d’Alban – Tome 1
de Jean-Luc Marcastel
Matagot – 448 pages
Je parlais dans un prédédent billet que je lisais avec plaisir du young adult et que je reviendrai bientôt sur Béhémoth de Scott Westerfeld et sur La Geste d’Alban de Jean-Luc Marcastel parce qu’ils étaient tous deux des exemples non exclusifs de ce qui peut se faire de bon en YA. Béhémoth a eu droit à son billet. Au tour à présent du premier tome de La Geste d’Alban, intitulé L’Enfant monstre.I est grand puisque que ce roman est à gagner pour le Winter Time Travel et que le Winter Time Travel s’arrête ce soir. Et l’idée de terminer sur une note plus que positive m’enchante beaucoup.
Ceux qui ont lu Louis le Galoup ne seront pas surpris par ce premier tome de la Geste d’Alban. Pas d’interprétation hative et erronnée de cette phrase. Ceux qui ont lu Louis le Galoup retrouveront avec plaisir l’univers médiéval-fantastique imaginé par Jean-Luc Marcastel ainsi que sa verve de conteur hors pair (et je mesure mes mots). Ce cycle se situe avant celui du Galoup mais peu après le cataclysme qui a frappé le Pays d’Oc, cataclysme qui a provoqué les Maljours. Près du lieu où s’est écrasé la météorite les mutations se font fréquentes et donnent naissance aux monstrueuses Malebestes qui n’hésitent à pas à tuer et ravager. Les combattre n’est pas simple. Alban est né dans un village situé non loin de la Brèche, lieu du cataclysme. Fils aîné du seigneur il a été touché par le souffle du Diable avant sa naissance. Difforme et maudit, cet adolescent vit masqué et rejeté de tous. Lorsque son père décède pendant la traque d’une Malebeste, il peine à prendre sa succession. Sa belle-mère, Dame Jacint, et la population le rejettent au profit de son demi-frère Enric, aussi beau, faux et couard qu’Alban est laid, pur et courageux. En ces jours difficiles, venez écouter la Geste d’Alban, l’enfant-monstre au coeur noble, l’enfant
Roman initiatique construit sur un schéma classique (quête et découverte de soi, amitié et trahisons, apprentissage de la vie tout au long d’épreuves plus ou moins – plutôt plus que moins ici – dangereuses), L’enfant monstre tire son épingle du jeu par sa forme, son style et son ton, loin des romans à la narration parfois un peu trop lisse, au style plat ou neutre. Jean-Luc Marcastel fait raconter la Geste d’Alban par un conteur, un troubadour que l’on rejoint au coin du feu, un soir de tempête hivernale, et que l’on écoute, suspendu à ses lèvres mais l’esprit vagabondant avec les héros du conte. Un conteur au vocabulaire riche, au langage parfois emphatique, toujours coloré, prompt à mettre en valeur les hauts-faits d’Alban et à dramatiser ses peines sans tomber dans la démesure ou l’outrance. Le conteur ne peut s’empêcher d’insister sur les valeurs morales d’Alban qui contrastent violemment avec les perfidies et les bassesses de son entourage. C’est un point qui peut parfois agacer par sa récurrence mais c’est le jeu du conte. Je me suis laissée emporter par les péripéties d’Alban lors de ce premier tome et c’est avec un grand plaisir que je me replongerai dans ses aventures lorsque sortira le tome suivant.
Les illustrations de Jean-Mathias Xavier, en fin d’ouvrage, permettent au lecteur de confronter la représentation qu’il s’était faite des personnages à celle de l’illustrateur. En bonus, l’auteur propose une carte (classique), un glossaire (utile pour les mots médiévaux ou occitans) et un addendum écrit en 1055, pendant les Maljours, par le Père Pastor, racontant la genèse des Maljours.
Un extrait
« Le nom de Couvertoirade, la mythique commanderie des Traquebestes, forteresse imprenable qu’on disait érigée dans la causse ensauvagé du Larzac, hanté de monstrueuses malebestes, résonna au cœur d’Alban comme un appel au rêve.
Combien de fois, depuis son enfance, avait-il rêvé de gravir les contreforts de pierre blanche de ces hautes terres où s’écartelaient les nuages, où le vent peignait de ses rafales brutales quelques arbres rabougris et tourmentés, où la pierre, usée par la pluie, le gel et le mistral, prenait des formes fantastiques pour mieux tromper le voyageur, lui faire prendre simples rochers pour des castels imaginaires ?
On affirmait que d’effroyables malebestes hantaient ce lieu, que des forces terribles, depuis les Maljours, étaient à l’œuvre dans les entrailles blanches du plateau, et que c’était justement pour les contrer, les contenir, les combattre, que les Traquebestes avaient bâti en ce lieu redouté leur commanderie.
Là-haut, entre les malédictions de la terre blessée et les fureurs colossales du ciel, on forgeait des hommes à nuls autres pareils…des hommes capables de se mesurer aux enfants de la Brèche et de les vaincre… des hommes comme Enguerrand de Trencavel… les Traquebestes. »
- Prix Elbakin du Meilleur roman de fantasy français 2012
- Lire les avis de SFU, Elbakin, Madoka, Dup, Chaise longue et bouquins, Histoires sans fin, Lectures et farfafouilles, Craklou, Hérisson, Des livres et moi, Mina, Lady K, Sophie, Paikanne, Karline05, Garlon, Nathanaelle, Acsylé, Fana de fantasy,
Mais tu arrêtes de me donner envie de lire des livres, oui ?
@Vert : à force de me seriner que je suis infréquentable, je le deviens ^^
La fantasy et les univers « monstrueux » sont ma tasse de thé. Heureux de voir que le genre est en plein mouvement et qu’il est loin d’être mort comme le disent certains.