La stratégie Ender – Gavin Hood

La stratégie Ender

Réalisé par Gavin Hood

Avec Harrison Ford, Asa Butterfield, Ben Kingsley …

Synopsis
Dans un futur proche, une espèce extraterrestre hostile, les Doryphores, ont attaqué la Terre. Sans l’héroïsme de Mazer Rackham, le commandant de la Flotte Internationale, le combat aurait été perdu. Depuis, le très respecté colonel Graff et les forces militaires terriennes entraînent les meilleurs jeunes esprits pour former des officiers émérites et découvrir dans leurs rangs celui qui pourra contrer la prochaine attaque. Ender Wiggin, un garçon timide mais doté d’une exceptionnelle intelligence tactique, est sélectionné pour rejoindre l’élite. A l’académie, Ender apprend rapidement à maîtriser des manoeuvres militaires de plus en plus difficiles où son sens de la stratégie fait merveille. Graff ne tarde pas à le considérer comme le meilleur élément et le plus grand espoir de l’humanité. Il ne lui manque plus qu’à être formé par Mazer Rackham lui-même, pour pouvoir commander la Flotte lors d’une bataille homérique qui décidera du sort de la Terre.

Mon avis
La Stratégie Ender est l’adaptation du roman éponyme d’Orson Scott Card, publié en 1985 en VO sous le (bien meilleur) titre Ender’s game. Dans le cas d’une adaptation je préfère toujours lire le roman avant. Généralement quand je lis le roman après avoir vu le film, je me sens parasitée par les images du film (je ne construits plus mes propres représentations mentales des personnages, des décors etc et ça handicape ma lecture). Bien souvent, si le roman comporte un “twist”, le film me l’a dévoilé et je perds une partie du plaisir de la lecture (j’aime bien quand les auteurs parviennent à me berner). Alors j’ai pris l’habitude de ne plus lire les romans dont j’aurais vu l’adaptation. Par contre, une fois le roman lu, voir une adaptation ne me pose aucun problème même si je ne peux dissocier les deux oeuvres. Je ne peux m’empêcher de juger l’un à l’aune de l’autre. La comparaison tourne presque systématiquement à l’avantgae du roman.  La stratégie Ender ne fait pas exception.
L’adaptation se montre assez fidèle mais souffre de quelques défauts. Dans le roman, l’apprentissage d’Ender prend bien plus de temps. Il a 6 ans quand il intègre l’école militaire. Il est déjà bien plus vieux dans le film et mieux armé pour faire face et répondre aux stratégies des adultes. L’éduction qu’il y reçoit m’a parue bien plus violente dans le roman que dans le film, impression de violence renforcée par la durée sur laquelle elle s’exerce (6 années dans le roman, une année dans le film). Si mes souvenirs sont bons, dans le roman il casse bel et bien le bras d’un de ses camarades (alors que dans le film il ne va pas jusqu’au bout de son geste) et il en tue un (en fait il en tue même deux) en situation de légitime défense (dans le film, un doute demeure sur la survie ou pas de Bonzo). Il se considère donc comme un meurtrier, comme un assassin ce qui renforce encore plus le twist final (que partagent le roman et le film) et lui donne une profondeur psychologique plus importante. Sur le plan de la violence psychologique, le roman enfonce le film (c’est d’ailleurs ce qui m’en a rendu la lecture difficile). Ender se voit coupé de tous ses liens affectifs (il a 6 ans rappelons-le), il ne trouve plus ni soutien, ni amour, ni bienveillance dans son école. Son apprentissage est conditionné par la haine, la jalousie, le sadisme et la cruauté. Son éducation fait de lui un monstre même si d’une certaine manière il y était destiné. Il oscille entre acceptation nécessaire de sa condition pour le bien de tous et rejet total de ce qu’il devient. La torture mentale que représente ce constant tiraillement transparaît bien plus dans le texte d’Orson Scott Card que sur le visage de Ender malgré le jeu sans défaut de l’acteur qui l’incarne. Le poids des mots est plus fort que le choc des images. Comparé au roman le film paraît lisse et édulcoré. Le jeu des acteurs (le froid et calculateur Graff incarné par Harrison Ford, l’impitoyable Mazer Rackham tatoué incarné par Ben Kingsley) ne parvient pas à donner une puissance au film et le spectateur reste en retrait. Les images sont belles mais génèrent finalement peu d’émotions. Et pourquoi avoir fait du lieutenant Anderson une femme dans le film ? Pour instaurer un peu d’humanité bien stéréotypée puisque, bien entendu, seule une femme, du fait de sa condition de femme, peut faire preuve d’un minimum d’empathie pour Ender ? Dans le roman, Anderson est un homme et ça passe très bien comme ça. Faire d’un roman aussi puissant un divertissement grand public en dénature fortement la saveur.

Cet article a 8 commentaires

  1. valeriane

    Quoi!?! mais que fait la police!!! Hop hop plié-emballé comme on dit

  2. Lystig

    j’ai lu un peu le début et la dernière phrase… je comptais le lire, une amie m’en a parlé, elle avait aimé et le relit avant d’aller voir le film
    je lis le livre et attend la diffusion à la télé ????

  3. Lhisbei

    @Lystig : m’est avis que tu n’auras pas le temps de lire le livre avant de voir le film. Il risque de ne plus être programmé rapidement car il ne rencontre pas le succès escompté. Attendre une diffusion télé n’est pas une très bonne idée : certaines scènes (entraînement, la bataille finale) méritent bien un très grand écran… Va voir le film et attend une bonne dizaine d’années pour lire le livre (comme ça tu auras oublié le film)

  4. Raven

    je suis comme toi : de façon générale, je préfère grandement lire le bouquin avant de voir son adaptation ciné/tv. Pour Ender, c’est un peu particulier, vu que j’ai lu le bouquin il y a très longtemps et que j’en garde un souvenir très flou (sauf que j’avais du mal à imaginer un si jeune gamin avec autant de maturité et d’intelligence pour faire ce genre de trucs!), le film a donc une saveur propre et a pu conserver son suspense. Je n’aime pas non plus me parasiter avec les images que peuvent nous imposer une adaptation, mais si je me souviens bien j’avais eu pas mal de difficultés à me représenter tout l’entrainement militaire, donc là pour le coup, ça m’aide.
    Bref, tout ça pour dire que je me le relirais bientôt avec grand plaisir, rien que pour creuser comme il se doit la personnalité et les épreuves subies par Andrew Wiggin… ^^

  5. endea

    Du coup cela ne donne pas très envie de voir ce film, je me posais la question, c’est réglé maintenant. En même temps il y a vraiment peu de films qui rendent hommage aux romans dont ils sont tirés, c’est dommage.

  6. vegapunk

    Merci pour cette chronique qui met en lien le livre et son adaptation dans le détail au lieu de se contenter de reproches généraux, parfois hyperboliques ou de mauvaise foi, qu’on peut lire ailleurs. J’avais lu Ender il y a longtemps et ne me souvenait que des grandes lignes avant de voir le film. A l’époque (il y a 10 ans dans ma cas ? je ne sais plus), le livre m’avait plu mais un peu déçu au regard de ce qu’on m’avait décri. J’ai eu l’impression de ne pas lire un roman adulte ou du moins d’avoir une histoire intéressante mais décrite sans souffle, sans ampleur. J’avais sans doute envie de rêver, d’être impressionné, alors que le livre avait une autre optique, que j’ai su apprécier vu qu’à l’époque les relations entre les deux frères est l’élément qui m’a le plus frappé. Eh bien ce film m’a laissé une très bonne impression ! Il est déjà indispensable, je crois, de le mettre en relation avec notre époque carencée en terme de films SF (hors comics) recherchée, avec un contenu derrière le spectacle. Le schéma de ce récit marche bien sur dans les pas du truc initiatique, type héros surdoué qui va devoir prouver ses compétences et sauver la Terre, mais faut croire que le roman était assez bon pour que même passé à la coupe au carré, il reste une matière encore fraiche, donnait lieu à des dialogues ou des scènes entières originales, voire osées pour cette branche de film (la fin entre autres, où personnellement je me suis dit “merci les adaptations, et fuck pour les lecteurs élitistes qui refusent de comprendre la chance qu’on donne au ciné par ce biais). Le perso d’Ender est très agréable, avec un excellent dosage de ses traits de personnalité. Ses camarades ne sont pas en reste et en règle générale, à part le leader de l’autre équipe, il n’y a pas de moments typiques de ce genre de récit, ou alors ils sont adroitement traités, sans abus. Pas de sentimentalisme malvenu, on est dans une empathie bien plus intéressante et adulte. Les entrainements en gravité, qui m’avaient déçus dans le livre (oui j’en attendais trop) sont dynamisés. Les combats spatiaux à coup de grands ensembles de drones sont me semble-t-il une réussite, et du quasi jamais vu au cinéma. Le thème de la simulation/réalité qu’on aurait pu penser vieillot dans un film moderne (ma plus grande peur) se révèle une force…Non vraiment, à part les retrouvailles faiblardes du frère et de sa sœur sur la barque, j’ai surtout vu de bons choix effectués, sans rajouts d’ordre à dénaturer le film, bien que je sois à présent sensible à ce que la chronique à pointer côté psychologie. Le problème étant qu’avec un héros enfant, on est (l’industrie du cinéma est) contraint(e) de recalibrer les choses, par rapport à la manière de vendre ce film, à la cible d’audience et tout ça. On a aussi pu dire que le film allait vite, très vite, pour en caser le maximum en deux heures. Je dirais que oui et non: le rythme m’a semblé bien dosée pour ne pas s’appesantir sur sur des moments “déjà vus”. La construction est n’omet pas d’ingrédients clés dans la compréhension de l’intrigue (même si j’ai dit plus tôt que le frère psychopathe m’avait marqué: en une scène et quelques rappels, ça marche aussi). Ah si, la toute fin, genre la dernière minute, est précipitée, ce qui gâche un peu les choses, vu l’importance des derniers instants d’une fiction pour l’appréciation du spectateur, en tout cas pour moi c’est important. Dommage pour tous ceux qui auront refusé de voir ce film pour de mauvaises raisons. Je crois qu’il n’a pas bien marché. Si j’ai un réel respect pour Gravity (le côté star tour de luxe, effets spéciaux dingues, vraie désorientation aidée par la 3D), je pense qu’il y a plus de choses à tirer du côté d’un Ender qui, sous une bande-annonce clichée à la “on va sauver le monde”(généralement j’évite tous les trailers, mais parfois on a pas le choix) , cachait de meilleurs atouts dignes d’un large public.

  7. Escrocgriffe

    C’est vrai que le film a un aspect lisse absent du roman. J’ai quand même apprécié ce long-métrage même si le roman demeure indépassable, on est d’accord !

  8. Vert

    Ah oui toi aussi tu as tiqué sur Anderson-femme là pour ajouter un peu d’empathie ? xD.
    Globalement moi j’ai trouvé le film plutôt fidèle (j’avais qu’une peur, qu’on nous colle une vraie romance avec Petra xD) et j’ai passé un bon moment devant l’écran. Mais je suis bien d’accord avec toi, il est loin d’avoir l’intensité du livre.

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