Le Vivant – Anna Starobinets

Le_vivantLe Vivant

D’Anna Starobinets

Mirobole – epub 355 pages

Après la publication en 2011 Je suis la Reine, recueil de nouvelles fantastiques et horrifiques d’Anna Starobinets, les éditions Mirobole poursuivent la traduction en français des oeuvres d’Anna Starobinets. Et moi, je poursuis ma découverte des écrits de l’auteure.

Anna Starobinets nous projette dans un futur lointain, post apocalyptique : l’homme a asséché la planète, la rendant invivable. Famines et épidémies se sont succédé. L’humanité a perdu tout sens commun : les animaux (sauvages ou de compagnie), accusés de propager les maladies, ont été éradiqués. C’était le début de la Grande Compression. En parallèle s’est développée une intelligence artificielle baptisée le Vivant qui a permis à l’humanité de survivre. Le Vivant connecte trois milliards d’individus – pas un de moins, pas un de plus – tous possédant un incode individuel et personnel. Grâce à lui, “la mort n’existe pas”, remplacée par cinq secondes de ténèbres : l’esprit est sauvegardé puis réincarné. Au sein du Vivant, chacun a sa place assignée. Le Vivant veille : les déviants, les rebelles, les handicapés sont envoyés en maison de Correction par le Service d’Ordre Planétaire. Grâce au Vivant, les humains sont libérés de leurs entraves physiques : ils ont accès au Socio, réseau social immersif composé de plusieurs strates. Leur vie se déroule là-bas, presque totalement virtuellement, sans réelle possibilité de déconnexion. Le Vivant s’occupe de tout. Le Vivant veille. Le Vivant assure l’immortalité et un monde parfait. Jusqu’au jour où nait Zéro, l’enfant sans incode. Inconnu du Vivant, danger potentiel pour l’harmonie de celui-ci, il sera isolé, coupé du Socio. Malgré tout il cristallisera l’attention , y compris des opposants comme Cracker, l’homme qui créa le Vivant et qui n’a de cesse de réincarnation en réincarnation, de le détruire.

Le Vivant est un roman ambitieux tant par les thématiques qu’il aborde que par sa narration éclatée : le lecteur reconstitue le parcours de Zéro par le truchement de documents divers (retranscriptions de conversations ou d’interrogatoires, notes de journal intimes, tchat sur le socio…) et par le prisme de plusieurs narrateurs différents, pas toujours clairement identifiés. Il se montre à la hauteur de cette ambition jusqu’à ce que Zéro, naïf ballotté et manipulé, change de dimension et atteigne, au gré de circonstances un peu tirées par les cheveux, l’élite de cette société.  De la critique sociale, mordante et sans concession, le roman bascule dans une forme de cynisme désespéré, avec intrigues politiques. Au passage Anna Starobinets sacrifie l’évolution de son personnage : avide de comprendre et de s’intégrer, plus Zéro prend conscience de la réalité du monde qui l’entoure, plus il perd sa combativité et s’enferme dans des illusions qu’il renforce. Malgré ce bémol sur la fin, je ne peux que conseiller la lecture du Vivant. D’autant que ceux qui ont lu Je suis la Reine retrouveront dans ce roman quelques images et éléments marquants présents dans le recueil.

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