La Société des faux visages – Xavier Mauméjean

La Société des faux visages

De Xavier Mauméjean

Alma éditeur – 288 pages

New York, 1909. Les premiers gratte-ciels attirent les regards. Harry Houdini, toujours en recherche de dépassement de soi, réalise une performance incroyable au sommet de l’Helios Building. Attaché tête en bas, les pieds enchaînés, il parvient à se libérer, sous une pluie battante, récoltant admiration et vivats du public bien au chaud derrières les vitres de l’immeuble.
Sigmund Freud et Carl Gustav Jung arrivent à New York pour donner une série de conférences. A l’issue de son exploit, il est abordé par le très désagréable secrétaire particulier du richissime Cyrus Vandergraaf qui souhaite le voir enquêter sur la disparition de son fils en lieu et place de la polie, corrompue et à sa botte. Dans ce milieu, le silence est d’or et le maintien des apparences une loi d’airain. Houdini ne sera pas seul sur l’affaire. Vandergraaf a recruté Sigmund Freud, de passage à New York. Accompagné de Carl Jung, il doit participer à un cycle de conférences à l’université Clark, dans le Massachusetts. Pourquoi l’homme le plus riche d’Amérique fait-il appel à un illusionniste et au père de la psychanalyse pour retrouver son fils Stuart ? Parce que ce dernier a fait livrer, sur les docks, un mystérieux container, hermétiquement clos et à l’ouverture piégée. Freud et Houdini doivent donc résoudre une série d’énigmes pour déjouer les pièges et pénétrer dans un container qui reproduit en réalité l’organisation de la psyché humaine selon Freud.

Deux juifs originaires de Hongrie, l’un spécialisé dans l’intrusion de l’esprit l’autre dans l’évasion, forment un duo improbable et pourtant complémentaire. Houdini, encore jeune, est d’une arrogance folle, née de son besoin de prendre une revanche sur la vie et de susciter l’admiration d’un père qui ne le comprenait pas. Freud, plus âgé, arrive aux États-Unis avec une réputation sulfureuse : ses théories psychanalytiques effraient. Sa propension à analyser tout le monde en permanence agace et intrigue Houdini. Pourtant leur collaboration porte ses fruits et leur résolution déjoue l’implacable mécanique mise en place par Stuart – personnage torturé et tordu que l’on découvre en creux. Les relations entre les protagonistes, y compris avec les personnages secondaires comme Jung ou Bess, l’épouse de Harry Houdini, ajoutent au plaisir de lecture.
Il est vrai que Freud et Houdini se trouvaient effectivement à New York en septembre 1909. Dans la réalité, leur chemins ne se sont jamais croisés. Xavier Mauméjean adore plus que tout imbriquer réel et imaginaire dans ses romans. La société des faux visages ne déroge pas à la règle et donne à voir, derrière le fard des illusions, la société du Gilded Age, de ses personnalités à la fortune indécente (mention spéciale à Hetty Green) à ses bas-fonds les plus sordides en passant par son asile très lovecraftien. La société des faux visages, clôt de bien belle manière la trilogie sur la mythologie américaine, commencée par Lilliputia et poursuivie par American Gothic.

Il existe une règle dans le spectacle, qui consiste à ne jamais annoncer par avance le résultat du numéro. Parce que, si jamais cela tourne mal, on ne peut pas se rattraper en improvisant. Le secret d’un show consiste non en ce que l’on fait, mais en ce que le public croit.

Cet article a 3 commentaires

  1. Baroona

    J’allais dire que ça semblait être dans une veine proche de “American Gothic”, mais c’est même un peu plus que ça en fait. ^^
    J’ai parfois un peu de mal avec ces jeux sur la réalité, mais ça reste tentant !

    1. Lhisbei

      Oui, mais comme Houdini et Freud sont des personnages connus et familiers, je me suis sentie en terrain plus familier que dans American Gothic. Plus accessible que ce dernier, donc. 🙂

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