Les Flibustiers de la mer chimique
De Marguerite Imbert
Albin Michel Imaginaire – 464 pages
Un monde post-apocalyptique
L’intrigue se déroule dans un futur proche où la civilisation a été détruite par des catastrophes environnementales, laissant la Terre dans un état désastreux. Les océans sont devenus des mers acides, la faune a muté, et la survie est devenue un défi quotidien pour les rares survivants.
L’intrigue est centrée sur deux protagonistes principaux, présentés à travers une narration alternée qui offre deux perspectives distinctes. D’un côté, il y a Ismaël, un naturaliste mandaté en mission secrète (y compris pour le lecteur) par la Métareine de Rome, dont le naufrage le conduit à être “secouru” par un groupe de flibustiers voyageant à bord d’un sous-marin dirigé par le capitaine Jonathan. De l’autre côté, nous avons Alba, une graffeuse dotée d’une mémoire encyclopédique, dernière rescapée de son clan, capturée et emmenée à Rome pour devenir omnisciente.
Le roman intègre de l’ironie, une touche de burlesque voire de rocambolesque et de la satire pour désamorcer la noirceur de l’univers (façon “Always Look on the Bright Side of Life” des Monty Python). Les personnages excentriques et les situations absurdes contribuent à apporter de la légèreté à l’histoire. Marguerite Imbert a de la gouaille, un ton irrévérencieux et un style percutant, avec des dialogues vivants et des échanges drôles entre les personnages.
Trois raisons pour lesquelles je n’ai pas aimé
Contextualisons brièvement cette lecture. Récipiendaire du Grand Prix de l’Imaginaire 2023, Les Flibustiers de la mer chimique est nominé pour le Prix Planète-SF des Blogueurs 2023 et constitue donc, pour moi, un “devoir” de lecture. Et je vais donc vous expliquer en quelques mots pourquoi je n’ai pas aimé ce roman, au demeurant d’une grande qualité. Tout d’abord, les personnages m’ont déconcerté par leur excentricité et par le mélange d’immaturité émotionnelle et de gravité. Ils semblent figés à un âge adolescent, avec en tête le capitaine du sous-marin, dont le comportement puéril et la manière de s’exprimer m’ont parfois agacé au plus haut point. En ce qui concerne Alba, on a droit à toutes ses pensées et ça défile très très vite dans sa caboche. Malgré ses punchlines et ses fulgurances, c’est fatigant.
Ensuite, même si le roman regorge de références littéraires et culturelles, à l’histoire, la littérature, la pop culture, qui raviront les amateurs de littérature et d’imaginaire, dont je suis, l’intrigue m’a semblé progresser avec lenteur jusqu’à un final assez explicatif, ce qui a provoqué en moi un sentiment d’ennui. Sur le fond, on retrouve des pures moments de SF : écologie, transhumanisme… c’est intelligent et percutant. Le parti pris du traitement décalé, original, mais l’idée d’une “apocalypse joyeuse” c’est, pour moi, comme prendre plaisir à danser sur Papaoutai de Stromae, une chanson tellement tragique : trop paradoxal pour mon petit cerveau. « On peut rire de tout mais pas avec tout le monde » disait Pierre Desproges. Je ne suis pas la personne idéale avec laquelle rire de l’apocalypse ou danser joyeusement après celle-ci.
Pour résumer, Les Flibustiers de la mer chimique est un excellent roman mais absolument pas pour moi.
Des extraits
De la Graffeuse
– C’est quoi, ce chapelet ?
– Tu ne sais pas ce que c’est ?
Sa réprobation me toucha l’ovaire droit sans faire bouger le gauche. Mettez-moi au parfum, qu’on en finisse, comme disait Winston Churchill.
– Il y a une graine pour chaque atome. Hydrogène, hélium, lithium…
– Et vous les connaissez tous ?
– Bien sûr.
Je poussai un rire de hyène. Les Romains adoraient le tableau périodique des éléments. Ils vouaient un culte à l’emboîtement des atomes, à cette combinaison de hasards qui avait donné naissance à la Vie. Nous ne sommes rien de plus qu’une combinaison parmi d’autres, pas vrai ? Au même titre que cette moustiquaire ou cet arbre, ou votre chat. Oui, ça se tenait. Toute cette mystique et tous ces arbres enchantés, ça me rappelait les leçons d’histoire d’oncle David. Mais oncle David ne croyait pas que l’on puisse conjuguer le symbolisme et la science. De toute évidence il se trompait.
De la Graffeuse toujours
Hé, tu veux entendre un truc drôle ? Si la planète Terre est un être vivant – une créature, un golem, une déesse, dis le mot qui te fait plaisir –, alors nous vivons à l’ombre de sa peau. Pas vrai ? Les arbres sont la toison qui pousse sur cet épiderme géant. De grands cheveux vivants. Ce qui ferait de nous, tu devines ? Une belle bande de poux.
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Je n’ai pas lu celui-là mais je vais lire celui sur Notre Dame Des Landes .
Bonne lecture et curieuse de ton retour (ne pas hésiter à repasser dans les comm de ce billet)
De mon côté j’ai tendance à penser que tant qu’on peut rire c’est qu’on est vivant mais en fait j’ai aussi mes sujets tabous qui ne me feront jamais rire donc je comprends bien l’argument !
Oui, c’est tout à fait vrai ! Rire c’est aussi rester vivant d’ailleurs…
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