Dictionnaire utopique de la science-fiction – Ugo Bellagamba

Dictionnaire utopique de la science-fiction

Ugo Bellagamba

Le Bélial, collection Parallaxe – 256 pages.

Retour de chronique du Bifrost 113

Le Dictionnaire utopique de la science-fiction, neuvième titre de la collection « Parallaxe », examine la SF au prisme de l’utopie et de la dystopie à travers trente-deux entrées auxquelles s’ajoute une trente-troisième, dématérialisée et disponible à la lecture sur le site de l’éditeur. De l’âge d’or aux Zones en passant par les Bibliothèques, les Mégapoles ou les Planètes-prisons, l’essai explore des sujets variés tels que les in­telligences artificielles, les gouvernements futuristes, la place des femmes, la représentation politique dans la SF, et aborde certains sous-genres spécifiques comme le cyber­punk, le solarpunk ou l’uchronie.

Ugo Bellagamba, romancier, essayiste, uni­versitaire français et historien du droit, adopte une vision optimiste du genre. Son dictionnaire va au-delà de la simple com­pilation de définitions et évite l’effet catalogue. Il propose une appro­che thématique et critique, con­sidérant la science-fiction comme un moyen d’imaginer des façons de vivre ensemble et de faire société. Le genre met souvent en lumière les maux de notre époque, sans fournir de solutions toutes faites pour résoudre les problèmes qu’il soulève. Cette caractéristique conduit parfois à percevoir la SF comme sombre et pessimiste, alors même qu’il lui arrive d’imaginer un monde meilleur tout en encourageant la réflexion sur notre propre réalité. C’est à ce champ spécifique que s’intéresse Ugo Bellagamba.

Pour chaque item abordé, l’auteur étaye ses arguments, illustrant ses propos avec des exemples tirés d’œuvres marquantes, qu’elles soient classiques, comme L’Utopie de Tho­mas More et La Cité du Soleil de Tommaso Campanella, ou plus contemporaines, à l’instar des univers créés par Gene Roddenberry, Ursula K. Le Guin ou Ada Palmer. Les références culturelles, tant classiques que populaires, démontrent leur pertinence, même si l’essai semble accorder une préférence aux textes anciens. L’ouvrage revient aussi sur l’histoire de la science-fiction, et met en exergue les contributions significatives des auteurs français au genre tout en soulignant la dimension métaphysique de celui-ci. Ex­plorer l’aspect utopique de certains thèmes, tels que le cyberpunk et les fins du monde, semble un exercice périlleux, mais Ugo Bel­lagamba relève le défi avec succès.

Accessible au néophyte, qui ne manquera pas d’établir une liste de livres à lire ou de films à voir, bien aidé dans sa tâche par les sources répertoriées en fin d’ouvrage, mais aussi utile à l’expert, ce dictionnaire « amou­reux » offre une exploration passionnante et unique des liens entre utopie et science-fiction.

Une citation

Concernant les intelligences artificielles (ou I.A.), cela fait bien longtemps que les auteurs de science-fiction ont envisagé de leur confier les destinées de l’humanité. Le plus souvent, c’est pour le pire. L’ordinateur semble, dans un premier temps, capable de tout résoudre et, rapidement, il devient une camisole numérique. Nombreux sont les récits qui imaginent l’inféodation totale de l’humanité aux machines, soit pour qu’elle devienne une source d’énergie, comme dans la saga Matrix des sœurs Wachowski, soit pour qu’elle fasse office de prothèse organique dans Transcendance (2014) de Wally Pfister. Mais le cliché qui domine, c’est l’éradication méthodique du parasite qu’est l’être humain, au nom de la sauvegarde de la Terre elle-même. Sauvegarde qui, ironiquement, est devenue la priorité d’une humanité qui, ayant enfin pris conscience de ses erreurs délétères, choisit de les résoudre à l’aide d’algorithmes. Rien d’étonnant à ce que les I.A. en viennent logiquement à considérer que la meilleure façon d’agir est de faire table rase de l’humanité.

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