Miscellanées de nouvelles (25) : Bifrost 97 et 98

Voici une nouvelle entrée dans la série des Miscellanées de nouvelles. Au menu du jour : des nouvelles numériques issues de plusieurs numéros de Bifrost cuvée 2020 et qui prenaient la poussière dans ma PAL. Voici donc un court avis sur les nouvelles au sommaire des Bifrost 97 et 98. Pourquoi  ? Pour pouvoir voter pour le prix des lecteurs de Bifrost. Et puis c’est aussi histoire de participer un peu plus au #ProjetMaki avant la fin du challenge.

Bifrost 97 (janvier 2020)

Dans “Pensées et prières”, Ken Liu radiographie une famille après la mort de Hayley, l’aînée, assassinée par un tueur “de masse” lors d’un festival. La mère, après avoir exposé son histoire sur internet, pour faire son deuil et militer pour une prise de conscience , se fait troller. L’image de sa fille est détournée, mis en scène jusque dans des films pornos. Les trolls s’en donnent à coeur joie. A partir des récits produits par chaque protagoniste (famille, ami, un troll), Ken Liu brosse un portrait de l’évolution de la société, entre omniprésence des réseaux sociaux et intelligence artificielle, libre circulation des armes et meurtres de masse. Le titre annonce la couleur : enrayer le phénomène qui endeuille régulièrement les USA avec des pensées et prières, commentaire sui revient très souvent sur les réseaux sociaux et dans la bouche des politiques – Trump first, n’est guère pertinent, mais quelle solutions apporter alors ? Très réussi. L’avis de Gromovar.

Comme les gens doivent être libres de posséder des armes à feu, on apprend aux enfants à se cacher dans les placards et à porter un sac à dos blindé. Comme ils doivent pouvoir poster et dire ce qui leur chante, on conseille aux cibles de revêtir une armure virtuelle.

C’est une autre histoire de famille que Daryl Gregory nous raconte dans “Les neuf derniers jours sur Terre”. On y suit LT de 1975 et sa pluie de météorite sur toute la surface de la planète jusque 2062, au crépuscule de sa vie. La pluie de météorite est en réalité un bombardement de graines extra-terrestres. Très vite et malgré les efforts des humains, les plantes se mettent à pousser. Elles se révèlent gigantesques, invasives, résistantes et toxiques. LT en parallèle vit sa vie : ses parents divorcent. Sa mère enchaîne les maris. Son père reste dans la ferme familiale. LT se marie  – avec un homme ce qui heurte les convictions religieuses de son père, puis adopte Christina encore bébé. Elle est originaire de Nouvelle-Guinée, pays ravagé : les plantes d’outre espace ont proliféré dans la jungle sans surveillance et ont envahi progressivement les terres arables et les villes provocant un effondrement agricole puis économique total. La famille s’agrandit pendant que le monde semble, dans un contraste feutré et distancié, vivre une lente apocalypse. Lire l’avis de Feyd Rautha.

Lire les avis de Tigger Lilly, Lorhkan, Lutin, Xapur, Le Chien critique sur le Bifrost 97 ou ses nouvelles.

Bifrost 98 (mai 2020)

Commençons par un aveu : je ne me souviens pas d’avoir lu van Vogt. Deux possibilités, j’en ai lu quand je vidais les rayons de la bibliothèque municipale qui se trouvait sur le trajet entre la fac et ma résidence universitaire et je n’en ai pas gardé un seul souvenir ou je n’en ai jamais lu. “Le Village enchanté”, nouvelle présente ici au sommaire du Bifrost 98 consacré à l’auteur, fleure bon le pulp ancien. Seul survivant au crash de son vaisseau sur Mars, Bill Jenner, se retrouve à errer sur Mars avec un équipement digne de McGyver (un couteau, un peu d’eau, quelques vivres). Pas besoin de scaphandre, l’atmosphère de Mars est toute à fait respirable. Quand Jenner trouve un village abandonné et doté d’une forme d’intelligence, il pense que avoir trouvé son salut. Hélas ce qu’il produit n’est gère adapté au terrien. Reste à lui faire comprendre ses besoin… S’adapter peut prendre des connotations bien diverses. J’ai un peu tiqué : Jenner essaie de comprendre comment fonctionne le village mais sa communication s’inscrit dans un rapport de force permanent et assez désagréable, une forme de pédagogie musclée, où bien entendu tout est dû à l’envahisseur (circonstance atténuante, votre honneur, Jenner cherche à échapper à la mort). Ceci dit, la fin – que je ne peux divulguer – peut être aussi lu comme le triomphe de l’intelligence autochtone.

Dans “Plaine-guerre” de Thierry Di Rollo, Sed, un troufion demande une permission pour rejoindre sa famille en pleine avancée de son armée sur le front. La guerre que mène l’Est contre l’Ouest dure depuis des années et ne semble plus avoir de sens ni de fin : il n’y aura ni gagnant ni perdant. Avancées et replis laissent un cortège de morts et une zone morte et empoisonnée par les gaz mortifères, un no man’s land qui rappelle celui de la Première Guerre mondiale. Pas de surprise avec Thierry Di Rollo. Pas d’espoir pour Sed, mais une très émouvante déclaration d’amour en filigrane.

“Le Dernier Verrou de Sveta Koslova” de Franck Ferric est une courte nouvelle empreinte de nostalgie. Sveta, atteinte d’une tumeur au cerveau incurable, revient sur les lieux de son enfance, une ferme à Khizhina, et brosse, au fil des souvenirs et de ceux enregistrés par sa mnemocam, l’histoire de son père et celle de la région à présent rongée par les dolines. Désolation et mort sans pathos dans ce texte à la plume maîtrisée.

“C’est vous Sannata3159 ?” de Vandana Singh prend aux tripes. En Inde, les riches vivent dans des gratte-ciels  pendant que la plèbe survit au ras du sol ou sous les pont d’autoroute. Les guerres de clans dans les rues sont filmées par les drones pour une émission de téléréalité “Les Bas-fonds de la Réalité”. Jinghur vit avec sa mère, sa soeur et sa grand-mère. Il ne mange de la viande que rarement. Il travaille dans une boutique de mentopatchs et vidéorêves où le client se fait rares. Il passe sont temps immergé dans la histoires du temps passé.  Lorsqu’un abattoir neuf et moderne s’installe, sa mère et sa soeur y sont recrutée. La famille sort de la misère, mais à quel prix ?

“À la recherche du Slan perdu” de Michel Pagel navigue entre hommage et pastiche. Le narrateur, jeune homme de bonne famille, a assisté lorsqu’il était enfant à la mort d’une famille de Slan lors d’un dîner chez lui. Comme il ne se souvient pas de la mort du fils de la famille et ami proche, il se figure qu’il est toujours en vie. C’est superbement écrit (et celle qui écrit ceci ne supporte pas Proust). L’avis de Feyd Rautha.

Les avis de Gromovar, Yossarian, Tigger Lilly, Lorhkan, Le Chien critique , Xapur, Anudar sur le Bifrost 98 ou ses nouvelles.

Pour aller plus loin :

Le #ProjetMaki

Cet article a 7 commentaires

  1. Alys

    Ah, j’ai lu le Bifrost 98, je connais donc ces textes-là! 🙂 Bien aimé le Van Vogt. J’étais déjà convaincue que j’allais aimer ce gars par l’épisode de C’est plus que de la SF et ça m’a confortée dans cette idée. Sannata3159 ne m’a pas beaucoup touchée, peut-être que j’en attendais beaucoup car j’avais lu l’avis de Tigger Lilly… Et j’ai adoré la nouvelle à la Proust. Il faut tellement que je lise Proust, je suis sûre que j’adorerais… 🙂

    1. Lhisbei

      Je parie que tu pourrais faire avec Proust ce que Tigger Lilly fait avec Zola 😛
      (les deux m’assomment)

  2. yogo

    Merci pour ce joli tir groupé… Bien reçu ta participation.

    1. Lhisbei

      Les deux autres Bifrost arriveront bientôt aussi (2 billets différents)

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